Bonjour,
Ça y est, nous descendons en Slovénie. C’est un paysage très différent de la veille qui s’ouvre alors à nous.
Nous parcourons le flanc d’une vallée assez encaissée jusque Bovec. Beaucoup de forêts et de beaux sommets se dressant au dessus des arbres. Nous passons au village pour nous ravitailler et nous renseigner sur les belles choses dans le coin. Nous avons beau être sur un lieu touristique, il n’y a pas trop de monde et nous pouvons tranquillement faire la sieste au bord de la Soca, Une rivière d’un bleu magnifique dans laquelle se dandinent d’énormes truites... ça donne faim cette affaire. Nous passons au bord du canyon, impossible de ne pas s'arrêter faire une photo, nous sommes des cyclotouristes après tout ! Cette entrée en matière en Slovénie nous a bien plu, il faisait très chaud mais nous avons rapidement trouvé des coins de fraicheur. Par contre pour se faire heberger, c’est fichu... l’attractivité du lieu a fait du tourisme une activité économique importante, ainsi dans tous les petits villages il y a avait autant de pancarte «chambre a louer» que d’habitations....
Pas grâve on s’est trouvé un super aire de picnic avec une cabane, un truc a faire des jaloux je vous assure ! on a du dormir sur les tables a cause des fourmis mais c’est un detail.
Le lendemain nous nous attaquons au Vrsic Pass, nous voulions voir une des maisons du parc et le jardin botanique, mais la première ne souhaitait pas nous répondre et le second était payant. Nous avons donc continuer notre route et après avoir descendu ce col dont les virages étais pavés (au grand bonheur d’Andréa... c’est de l’ironie) nous avons atteint kranjska Gora.
Il faisait très chaud et il a fallu temporiser (sieste) avant de se remettre en selle. Nous avions prévu de bivouaquer un peu avant la ville de Bled car nous y avons rendez vous le lendemain, j'ai réussi à entrer en contact avec un des responsable du parc national qui a accepté de nous recevoir et de discuter.
En cherchant un coin sympas au bord de la rivière Radovna, nous tombons sur un couple de cyclovoyageurs à l'allure sympathique.
«Hi ! how are you ?», «vous êtes français» qu’ils me répondent... j’ai peut être pas un si bon accent que ça finalement.
Nos deux nouveaux amis avaient quitté Ljubljana le matin même et entament a peine leur voyage pour rentrer à Grenoble, notre parcours en sens inverse quoi. Nous avons donc passé une super soirée d’échange et de rigolade puis une bonne nuit a la belle étoile au bord du torrent.
Ce matin on a battu notre record de tardivité au départ, faut dire qu’on s’est trouvé des potes vraiment sympas !
Après un au revoir, nous prenons la direction de Bled en plein cagnard. Entrée dans la partie la plus touristique du pays,nous ne nous y sentons pas à notre place. en quelques coup de pédales nous atteignons finalement la maison du parcoù nous accueille Andrej Arih, le responsable du comité de protection de l’environnement du triglav National Park (TNP).
Ce parc est l’un des plus anciens d’Europe (1924), d'abord de faible superficie il s’est étendu jusqu'à devenir ce qu'il est maintenant. Cet aire est protégée et régulée par l’homme, le bûcheronnage et la chasse y sont donc pratiqués.
Le principal problème est que seul 25% du parc appartient à l'État. Il est donc très difficile d’initier des projets ou de modifier le règlement car l’attrait économique n’encourage pas les communes dans ce sens.
Cet environnement étant complètement ouvert et accessible pour toutes les activités non motorisées, il souffre énormément du tourisme. (Il faut savoir que la Slovénie est depuis quelques années la destination touristique privilégiée en Europe) Ce dernier prend trop de place, y compris dans les activités de production agricole car les fermiers préfèrent maintenant équiper leur terre pour accueillir les visiteurs.
Le parc est membre de toutes les organisations internationales existantes dans ce cadre et dispose d’accords, de possibilités d’échanges avec des parcs du monde entiers afin de contribuer au partage de connaissances.
Il est dommage que la bureaucratie et le tourisme freinent autant les activités de protection de l’environnement car le TNP héberge un écosystème d’une richesse incroyable.!
Les points marquants sont la protection du grand tétra (en perpétuelle diminution...) et la lutte contre les bark beetles (insectes nuisible s’attaquant aux forêts) qui obligent à couper des millions de mètres cubes de bois.Notre interlocuteur pointe alors un fait marquant ralentissant considérablement les efforts face au changement climatique. Lorsque les gens sont interrogés sur ce qui ne va pas au niveau environnemental, ils parlent bien des bark beetles et de la disparition des espèces, mais ne s'intéressent pas à la cause. Ainsi pour la majorité des gens le problème est l’insecte lui-même et non pas le changement climatique qui l’a poussé à venir s’installer en Slovénie...
Le TNP est en plein cœur des routes migratoires de nombreuses espèces et le respect de ces endroits de passage fait aussi partie des priorités. Le passage et l’installation de Lynx, loups et ours est vu comme un fléau par les agriculteurs qui ne comprennent pas qu’en clôturant leurs parcelles ils gênent ces animaux dans leur déplacement et les déboussolent.
Concernant le réchauffement climatique, il génère principalement des problèmes en termes de ressources en eau. Alors que la slovénie était un paradis pour le ski de rando, il ne neige désormais plus assez. Le Triglav qui se reposait jusqu'à maintenant sur sa couverture neigeuse pour subsister doit maintenant se contenter des maigres réserves d’eau souterraines et des faibles précipitations pour les remplir. « si cela continue ainsi, il nous reste 20 ans de ressources en eau» nous confie notre hôte...
Il n’y a plus d’hiver et cette disparition des saisons est ce qui l’attriste le plus. L’idée que ses enfants ne verront jamais leur pays couvert d’une belle couche neigeuse parcouru par l’incroyable faune du parc lui crève le coeur. Car cette homogénéisation du climat sur l’année a une conséquence directe sur les chamois. Les plantes n’ayant plus une période de croissance suffisante ne permettent plus à ces cervidés de subsister et laisse alors la place à leur cousins les cerfs rouges qui tend à dominer tout l’espace.
De par son organisation, les actions du parc sont limitées à de la sensibilisation et du recensement. Les recherches scientifiques sont menées par des universités ou laboratoires.
Une carte donnant accès à tous les transports en commun et musées a été mise en place afin de limiter l’affluence de véhicules. Les efforts de projets vont désormais plus dans la gestion de l’affluence touristique que dans la protection directe de leur patrimoine naturel.
Nous sortons de la maison du parc à 13h et il fait trop chaud pour vraiment avancer. A partir de ce moment, nos plans des jours suivants sont quelque peu chamboulés. D’abord par un gros orage qui nous trempe jusqu’aux os, puis dans la soirée a cause d’une grosse intox alimentaire qui gâche quelque peu le voyage. Ce soir nous dormons comme nous pouvons sous l’un des plus gros orages que j’ai vu., les éclairs déchiraient le ciel au point de faire trembler la terre, Dans mon état nauséeux je n’ai pas trop apprécié cette expérience. Encore bien malade, je reprend tout de même la route car j’ai bien envie de découvrir ce pays.
Une fois la partie touristique derrière nous, nous sommes ébahis par la beauté du paysage, la rusticité des villages et l’abondance de forêts. Afin de permettre l’accès aux petits villages perchés, les montagnes voient leurs flancs parcourus d’innombrables petites routes invisibles depuis le fond de vallée. Il y a donc un énorme potentiel de balade !
Dommage que des remontées acides et relents soufrés ternissent l’expérience. Andréa s’est elle régalée, notament lors des coups de cul a 25%. Les dénivelés sont certes moins importants mais les panneaux indiquent fréquemment des pentes supérieurs a 20%.
Lors d’une étape a Cerkno nous avons été accueilli, je dirai même adoptés par une famille adorable ! Nous constatons que les slovènes sont des gens curieux et sans préjugés (ceux qu’on a rencontré en tout cas) même si notre premier interlocuteur ne parle pas anglais, sa volonté de comprendre l'amène à appeler ou aller chercher un traducteur. C’est ainsi que devant une jolie ferme avec un grand hangar une personne âgée ( 93 ans, et a 7h du matin elle est déjà en train de bêcher le jardin, respect !) appelle sa petite fille. Polona nous a alors intégré à sa famille, la mère nous a préparé des plats locaux et pour mon mal de ventre, il m’ont apporté de la «boisson à base de plantes qui guérit tout». vous avez deviné c’était marqué 50° dessus. Pourtant je n’ai pas pu profiter de tout cela depuis ma position foetale sur le canapé. Encore une fois Andréa s’est elle bien régalée !
Je ne remercierai jamais assez ces gens qui se sont si gentiment occupés de nous.
Je voudrais revenir un peu sur ma description du paysage Slovène. ,C’est vraiment particulier, j’ai l’impression qu’une unique route principale relie les sièges économiques et touristiques du pays, laissant alors le reste de la région au calme. Et tant mieux !
Nous sommes en basse montagne, les pentes alternent prairies et forêts, les cols nous dévoilent parfois une vallée, autrement nous débouchons sur un plateau. Les champs sont parsemés d’étendoirs à foin, je n’avais jamais vu cela avant.
Dans les petits patelins il est bien plus facile d’aller discuter et de rencontrer les gens, de découvrir leur histoire et d'apprendre sur leur culture. La plupart des habitants possèdent un grand hangar en bois très typique couvrant bien souvent des engins agricoles de tailles différents. En parrallèle d’un autre métier, terres et troupeaux permettenr a nombre d’entre eux d’avoir la possibilité de revenir a une forme d’autosuffisance alimentaire si besoin.
A coup de coca zéro j'arrive à calmer un peu mon malaise et nous prenons des chemins plus directs pour, 2 jours après arriver à Ljubljana dans la matinée. On m’avait parlé d’un ville/village mais que neni... Certes ce n’est pas paris mais c’est déjà trop pour nous, le centre ville est joli mais assez restreint et le bout de chaque rue ramène au trafic dense et a des zones industrielles.
Je trouve de quoi emballer le vélo pour mon retour et nous nous dirigeons vers la périphérie de Ljubljana pour trouver un logement. J’aborde un homme sortant de sa voiture, ne parlant pas anglais il nous passe sa fille. Le tour est joué, nous dormons dans le jardin. Cependant nous avons bien ris car ces personnes de la ville n’auraient jamais imaginé que des gens puissent se déplacer à vélo et dormir dehors pour le plaisir. Par pitié il nous proposent une pizza, au grand bonheur d’Andréa, personnellement je me contente de mes compotes riz-carottes pour bébé afin de ne pas brusquer mon estomac tout juste fonctionnel.
Bien reposé et le ventre apaisé, nous pouvons nous lancer dans une dernière sortie. Et pas des moindres car nous prévoyons d'aller voir ce qu’il y a derrière les montagnes à l'horizon. Ce tour de 135 km et 2500 de dénivelé nous aura donc permis de basculer en Autriche et de remonter par un autre col. L’approche et le retour par la plaine furent vraiment long mais nous sommes très contents de nos découvertes. Un premier coup de cul sur une piste où même les chaussures n'adhèrent plus assez pour pousser le vélo, puis 20 km dans les gorges de la vallée de Suca. Nous en prenons plein les mirettes juste avant d’entamer la montée vers les contrées germanophones que nous ne parcourons que brièvement.
Le panorama est vraiment incroyable.
De retour à Ljubljana, ça sent vraiment la fin. Nuit en Airbnb et 15h de bus avant de retrouver Chambéry. Mais malheureusement sans mes affaires. Je n’ai pas envie de rentrer dans les détails ici mais c’est a la déchetterie ... euh la gare routière de Milan que je me suis fait voler toutes les affaires. Le vélo, les sacoches et leur contenu, caméra avec les films, gps avec les traces etc ...
J’ai vraiment l’impression qu’on m’a retiré une part de moi même et j’entrevois déja les deux prochains mois de travail pour rembourser le VTT d’Andréa...
Voilà, bien qu’elle se finisse mal cette aventure était incroyable tant en termes de rencontres que de paysages. Cette expérience m’a énormément marqué et n’est que la première étape de mes projets ! j’espère que ce récit vous aura plu et je vous conseille vivement de suivre Andréa qui a continué sa route vers le cap nord.
Bonne journée !
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